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14 novembre 2010 7 14 /11 /novembre /2010 17:00

ou comment à l’Elysées on étudie l’Histoire politique

Le système politique français ne connait pas les élections de Mid Term. Depuis la réduction du mandat présidentiel de sept à cinq ans voulue par Jacques Chirac, l’élection présidentielle et celle législative ne sont séparées que d’un petit mois. Cela réduit grandement les risques de cohabitation, cauchemar politique de tout chef d’état, sauf si le corps électoral devait faire preuve d’une étonnante tendance à la schizophrénie. La France devrait ainsi pouvoir compter au début de chaque quinquennat sur une période de stabilité, ou tout au moins d’une relative cohérence dans l’action politique de l’exécutif. Toutefois, pour pimenter les conversations du Tout-Paris et remplir les pages politiques des quotidiens, la savante alchimie institutionnelle met à disposition du palais de l’Elysée un ressort presque inépuisable : le remaniement. Tel acte, qui devrait servir à rééquilibrer la composition d’un gouvernement en cas de : a) profonde crise du pays, ou b) discorde entre alliées en un gouvernement de coalition (pratique fort prisée en Italie), devient de plus en plus un outil de marketing politique. Au sein de la gestion de l’ « offre politique » (concept que nous avons déjà eu le loisir de réfléchir), le remaniement est bel et bien l’équivalent du renouvellement des collections pour la prochaine saison. Mais si la plupart des remaniements n’ont que des vertus cosmétiques, ils peuvent parfois receler un dessin stratégique bien précis.

L’une de nos préoccupations majeures est l’ignorance de l’Histoire et les méfaits de cette méconnaissance sur la marche actuelle du monde. En observant l’actualité politique de ce week end, en revanche, nous ne pouvons que nous féliciter.

L’événement majeur de la vie politique française et l’élection présidentielle. A l’approche de l’échéance les fidélités politiques s’effilochent, les couples institutionnelles se brisent (métaphoriquement et parfois même réellement, comme ce fut le cas pour un certain couple socialiste jadis à la mode), les amis de trente ans ne se parlent plus, les dauphins se transforment en requins… Bref, pour prouver encore une fois que l’évolution de l’espèce humaine n’est qu’une affaire de technologie et que les bons vieux reflexes et ambitions sont toujours les mêmes, on pourrait dire que les différentes factions déploient leurs armées en vue de la Guerre de Succession. Les hommes et femmes politiques se préparent à l’affrontement, et le Président en place, souvent, voudrait bien briguer un deuxième mandat.

Nicolas Sarkozy sera sans aucun doute candidat en 2012. Tandis que le Parti Socialiste semble encore en proie aux discussions (dissensions) internes, le Président aura a faire avec la candidature probable de Dominique de Villepin qui pourrait lui faire manquer quelques voix de la droite libérale lors du premier tour, tandis que l’héritier de Jean-Marie Le Pen viendrait menacer l’aile la plus conservatrice du réservoir électoral de l’UMP. Et le parti présidentiel même, si les sondages d’ici 2012 devaient montrer un affaiblissement du Président sortant, pourrait être tenté d’envisager une autre candidature. Mr Sarkozy a ainsi tout intérêt à neutraliser tout champion de l’UMP qui pourrait venir le défier lors du grand tournoi électoral.

L’histoire des derniers duels présidentiels nous montre qu’être Premier Ministre et candidat à la magistrature suprême équivaut à courir inexorablement vers la défaite : Chirac en 1988, Balladur en 1995, Jospin en 2002… Nommer un Premier Ministre à quelques mois ou années de l’élection présidentielle se résume donc à le lester d’un sérieux handicap. Or, Mr Sarkozy semble connaître l’Histoire. Un François Fillon libéré de Matignon aurait deux ans devant lui pour se présenter comme un candidat potentiel, avec à son actif la victoire remportée face à la gauche pour la réforme des retraites et la préservation du rating de la France. François Fillon incarnerait alors une « force tranquille » de droite, il serait quasiment pompidolien… Face à une opposition de gauche qui a fait de l’antisarkozysme son cheval de bataille, à default de toute proposition solide (même le PS a reconnu qu’il ne reviendrait pas sur l’avancement de l’âge de départ à la retraite, tout comme l’UMP n’a pas supprimé les 35 heures), la candidature de Mr Fillon désarmerait les adversaires. Sauf s’il a attendu l’élection en poste à Matignon. On ne remporte pas une bataille si les troupes qui montent à l’assaut sont épuisées par la vie de tranchée.

C’est pour ces raisons que, fort probablement, François Fillon succédera à lui-même dans les prochaines heures : il pourra ainsi passer à l’histoire comme un Premier Ministre ayant gouverné pendant toute une législature, mais ses chances d’entrer à l’Elysée seront fortement compromises. Ou alors l’Histoire politique connaitra un nouveau cas d’étude.

 

 

 

 

  

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